On ne sait pas par où commencer
« Chers amis,
Notre rapport pour cette année 2007 veut vous présenter nos réalisations, nos projets, nos soucis et nos problèmes quotidiens au milieu d’Akamasoa et dans le pays !
Nous travaillons au milieu d’un peuple qui fait des efforts et qui manifeste déjà des signes d’espérance malgré la situation qui reste difficile !
Quand nous vivons dans un pays qui possède 75% de gens en dessous du seuil de pauvreté, il est très difficile d’avancer vite ; Trop d’embouteillage, trop de pauvreté ! On ne sait pas par où commencer!
Cette année l’Etat a d’abord été occupé par les élections présidentielles, puis par le référendum pour changer la constitution, ensuite les élections législatives, et enfin, à la fin de l’année, les élections communales !
Les gens se sont peu déplacés pour aller voter ! Ils sont déçus et ils ne voient pas d’amélioration du pouvoir d’achat dans leur vie !
La situation économique est faible, pas de nouveaux grands investisseurs hormis trois grandes entreprises multinationales qui se sont implantées à Fort Dauphin pour extraire l’ilménite, et qui ont dû emmener beaucoup de main d’œuvre de l’extérieur, des plombiers venant des Philippines, et des maçons d’Afrique du Sud. A Moramanga c’est l’extraction du nickel, et dans le Nord ouest ce sont des compagnies internationales, qui cherchent le pétrole !
Dans la capitale nous voyons que l’envie de travailler baisse, puisqu’on ne gagne pas ce qu’on imaginait !
Beaucoup de chômeurs à tous les coins de rues, des dizaines d’hommes en bonne santé, qui traînent sans rien faire dans tous les marchés de La Ville !
La sécurité est de plus en plus inexistante et il y a un laisser aller qui s’accroît Nous assistons à une recrudescence de vols et de violences de toutes sortes. Tous les jours les journaux locaux mettent en première page des crimes, des viols, des vols etc. !
Cette situation ne peut pas aider à redonner la force nécessaire et l’espérance aux personnes, aux simples citoyens qui ne savent à qui se vouer !! Les évêques catholiques, une force morale pour le pays, ont été très critiques face à la situation actuelle !! Ils dénoncent les violences, les vols, la corruption. Les investisseurs n’ont pas d’impact palpable pour la population !
Les évêques parlent aussi de l’absence de démocratie dans une administration envahie par la peur !
Il y a quelque part un désespoir généralisé concernant les affaires nationales, constatent les évêques ! A cause de la difficulté de la vie, de nombreux parents continuent à boire pour oublier leurs problèmes comme ils disent ! Bien sur, les jeunes sans travail cherchent également dans la drogue une issue à leur désespoir !
La bonne gouvernance et le changement de mentalité ne sont pas pour demain ! Mais il nous faut agir dès maintenant !
En dépit des efforts déployés par l’Etat, il y a encore trop de trafics, d’abus et de corruptions sur les richesses naturelles de Madagascar, notamment en ce qui concerne le bois de rose et les pierres précieuses !
Il y a encore trop de laisser aller, d’indifférence. Personne ne veut prendre de responsabilités. Cette mentalité doit être combattue sur tous les fronts ! Nous le faisons à Akamasoa d’abord !
Cette situation provoque l’inertie chez les gens honnêtes et le profit chez les gens sans scrupules, puisqu’ils abusent de cette situation pour s’enrichir sur le dos du peuple !
C’est une habitude des dirigeants de tous les pays de toujours relativiser la violence et de dire qu’ailleurs c’est pire. Cela ne doit pas être un prétexte pour ne pas chercher les solutions aux problèmes quotidiens du peuple malagasy !
Il est vrai que les moyens que possèdent les Gouvernements en Afrique pour lutter contre tous ces fléaux sont vraiment dérisoires voire presque nuls ! Quand on pense que L’Ile de La Réunion, département Français dans l’Océan Indien, a un niveau de vie 64 fois supérieur à celui de Madagascar et la France de 130 fois plus ! Cette différence de niveau de vie explique nettement beaucoup de choses !
Notre association Akamasoa a travaillé grâce à l’aide de tant de gens de bonne volonté qui nous ont envoyé les moyens financiers pour continuer à travailler et à avancer !
Conclusion : Le travail continue…
Il y a des espoirs qui font relever le courage de travailler ! Par exemple : au mois de novembre le Président de la République a organisé un dialogue présidentiel sur les 8 défis majeurs du MAP (Madagascar Action Plan) ! De nombreuses personnalités ont été invitées venant de toute part de la Grande Île. Elles sont venues à ces assises nationales pour faire l’état de la vie de la Nation dans tous les domaines ! J’ai été aussi invité et très bien accueilli en participant aux travaux des commissions ! Nous avons réfléchi sur les problèmes, sur les obstacles au développement, et nous avons apporté des propositions pour se sortir de la pauvreté et de l’indifférence !
L’ambiance était très bonne, les idées ne manquaient pas, tous veulent croire que rien n’est perdu à l’avance, que le décollage économique et la réduction de la pauvreté sont possibles ! Les comptes rendus finaux ont été clairs. Maintenant il faut voir si ces déclarations de bonne volonté auront plus de chance d’être réalisées concrètement dans la vie réelle que les documents précédents !
Sachant que tous les documents sont bons en principe, mais c’est l’application qui fait toujours défaut ! C’est comme dans une Ville où tout le monde est pour le respect de l’environnement, et où personne ne veut descendre la poubelle ! A Akamasoa avec nos 412 collaborateurs, tous malgaches, nous essayons au jour le jour de prendre les choses en main et de relever le défi au quotidien ! Cette année nous avons encore reçu des milliers de familles, de parents et d’enfants au Centre d’accueil d’Akamasoa !
Nous avons reçu des visites importantes qui nous ont encouragés à continuer notre combat pour la justice et la dignité que nous avons entamé il y a 18 ans pour les plus pauvres du Pays ! Nous pensons que nous avançons, tout en sachant, qu’il nous reste beaucoup à faire.
Nous allons continuer à nous battre tous les jours pour faire prendre plus de conscience à nos familles, aux parents, de leurs responsabilités dans l’éducation de leurs enfants ! Nous voyons d’ailleurs une amélioration chez les parents ! Ils commencent à devenir plus responsables ! L’affaire de « L’Arche de Zoé » a un peu dénigré l’action des ONG. Quelques illuminés ont voulu sauver l’Afrique à eux tous seuls, et avec de grands moyens ! Il faut répéter souvent, que L’Afrique se sauvera grâce à ses propres citoyens et à partir d’elle seule et de nulle part ailleurs ! Ils ont touché aux enfants d’Afrique, et cela a fait éclater la poudrière !
Mais s’il existe de telles exactions dans l’humanitaire. C’est aussi parce que les autorités de l’état ne sont pas à la hauteur de leurs responsabilités ! Ce fiasco et scandale de « L’Arche de Zoé » manifeste aussi un vrai problème : une grande partie des enfants d’Afrique sont abandonnés à leur propre sort et restent sans avenir, avec la faim au ventre et la mort comme seule issue !
Il est certain que des politiciens sans scrupules ont bien profité de cette occasion pour dénigrer les associations humanitaires dans leur ensemble ! Bien sûr, que tout n’est pas parfait ! Mais il faut savoir qu’il existe tant de personnes qui réalisent un travail extraordinaire dans la discrétion et l’humilité et qui font prendre conscience, au niveau planétaire, de la responsabilité que tous les hommes et femmes ont sur terre, de devoir participer à la lutte contre la pauvreté qui fait souffrir trois personnes sur six sur notre Planète ! »