Fête de Pâques 2016
En ce dimanche 27 mars 2016, nous célébrons la fête de Pâques, et nous vous souhaitons à tous et à chacun, chers frères et sœurs de bonne volonté à travers le monde, Joyeuses fêtes Pâques ! Que la joie de la résurrection et du triomphe du bien sur le mal, de la vie sur la mort, de l’amour sur la haine et de la paix sur la guerre, puisse régner dans le cœur de chaque être humain sur terre !
Chaque année, pour tout le peuple d’Akamasoa, ces fêtes de Pâques sont le moment de se réunir une nouvelle fois ensemble et en grand nombre, de se recueillir sur ce qui est le fondement de notre foi et de se réjouir aussi, puisque par sa résurrection, nous savons que Jésus nous a sauvés.
Depuis le début du Carême, chaque vendredi de chaque semaine, les habitants de nos différents villages organisaient un chemin de croix. Les personnes d’Akamasoa se réunissaient en fin d’après midi et retraversaient les 14 stations de la passion du Christ, en priant, récitant, chantant. Une façon de peu à peu intérioriser et comprendre ce qui fait notre foi.
Cette semaine Sainte, qui clôt le Carême, s’est déroulée en plusieurs moments.
Jeudi
C’était le moment de l’institution de l’Eucharistie, comme nourriture spirituelle, pain de vie, qui est indissoluble du service, parce que Jésus a continué par le lavement des pieds de ses disciples, pour bien montrer que celui qui veut être le premier doit être le serviteur de ses frères, renversant ainsi la logique habituelle des hommes.
Cette messe du soir fut cette année d’une grande force. On sentait l’attention et le recueillement des personnes pour écouter la parole de Dieu, en recevoir la force et l’amour. Mais ce ne fut pas tout ! Un événement a secoué toute l’église et les milliers de personnes qui priaient …
Car soudain, vers 19h30, alors que la célébration touchait à sa fin, un énorme orage a éclaté, ce qui est fréquent ici, et cette année la période des pluies semble s’être un peu décalée, puisqu’ après le calme des derniers mois, la pluie tombe dure et forte chaque soir.
Mais ce fut ce soir là un tonnerre venu de nulle part, qui a fait trembler le toit de l’église pendant plusieurs secondes…
La foudre est tombée sur le toit de l’église, ce qui a provoqué un craquement assourdissement, qui a plongé toute la foule dans l’obscurité et un silence étonnant. Le danger était bien là, car le toit et toute la charpente de notre église sont en fer… Et la foudre a tapé sur un côté du toit, et certains l’ont vu rentrer dans la structure métallique et la traverser de part en part, d’un côté à l’autre, grillant instantanément les deux lampes qui se faisaient face au milieu de l’église ! C’était très dangereux, et les disjoncteurs ont sauté bien sûr !
Toutes les lumières se sont éteintes, les gens sont restés pétrifiés, plongés dans l’obscurité totale par la coupure de courant. Et pourtant, aucun cri de désespoir, ou de peur. Au contraire, petit à petit les gens ont allumé leurs lampes de poche et les jeunes de Manantenasoa ont entamé un chant pour tranquilliser la foule, ce qui nous a donné à tous un air de ressuscité, après avoir passé un moment terrible… La dangerosité de la foudre en effet aurait pu brûler ou blesser à mort des enfants, mais par miracle personne n’a été touché.
Et ce chant des enfants qui a succédé à la foudre, a redonné la paix à tout le peuple d’Akamasoa, qui a continué la prière et la procession avec le saint sacrement, avec les seules lampes de poche pour lumière. C’était en effet la fin de la messe, et le moment du recueillement à l’approche de la résurrection de Jésus. Pratiquement tout le peuple était à genoux pour célébrer ce mystère, dans l’obscurité, avec la pluie qui s’était mise à tomber très fort sur la colline de Manantenasoa.
Cela a donné une dimension supplémentaire à ce jeudi saint, où Jésus, priant à Gethsémani, est entré en combat contre les ténèbres. Ce combat, nous l’avons revécu d’une certaine façon, à Akamasoa, avec ces ténèbres qui nous sont tombées dessus. Mais c’est la présence de Dieu qui a été la plus forte, plus forte que ce phénomène naturel qui nous a surpris d’une façon tellement imprévue.
Sans aucun doute, cet événement restera dans les mémoires de tous ceux qui l’ont vécu !
Vendredi.
Vendredi saint, nous avons fait un grand chemin de croix dans notre village de Manantenasoa, sur la colline. Partis du cimetière dans le quartier de Mangarivotra, nous avons cheminé, lentement et dans le recueillement, tout autour de la colline, passant près du Centre d’Accueil, au-dessus de la grotte, sur la pointe de Bemasoandro, puis revenant par les quartiers de Lovasoa et Mahatazana, avant de rentrer à l’église, et de célébrer la messe.
Ce chemin de croix est toujours empreint de beaucoup d’émotion, en raison de la foule d’abord, qui grossit peu à peu à mesure qu’on traverse les quartiers : on voit des familles qui rejoignent la longue cohorte de ceux qui prient déjà, et se mettent à chanter avec elles.
C’est le père qui conduit la première station du cimetière jusqu’au centre d’accueil, et la dernière, à la montée de Macolline : qui conduit, c’est-à-dire qui porte la croix, comme le Christ, avec l’espérance que ce lieu de souffrance puisque continuellement changer en un lieu de paix, de fraternité et de partage.
Entre les deux, des hommes portent des croix, s’agenouillent à chaque station, prient, et chantent bien sûr, chantent toujours, avec ces chants malagasy qui viennent de loin, et parlent de l’amour de Dieu, de la souffrance, de la vie et de la joie. On ne peut pas rester sans émotion lorsqu’on entend ces voix qui viennent du cœur, très sûres car elles sont habituées à chanter, ces voix de tout un peuple uni qui trouve sa beauté, non dans les œuvres d’art comme les occidentaux, mais dans un art non écrit, d’être ensemble et de prier.
Car c’est un peuple qui est réuni pour prier, et cela fait sa beauté : recueillement, cheminement de tous ensemble, arrêts, reprise du mouvement, avec des chants toujours. Tout un peuple, le peuple d’Akamasoa, que la dureté de l’existence quotidienne réunit, et qui trouve dans son lien avec Dieu une force pour aller de l’avant, continuer, se battre, et dans Jésus Christ un appui, un réconfort, un amour dont l’exigence est désormais fortement rappelée par le pape François, en cette année de la miséricorde de Dieu.
Quand nous passons autour du marché de Macolline, les vendeurs ferment leurs boutiques, et se mettent au bord de la foule, formant une haie silencieuse, très respectueuse, et on voyait leur participation et leur désir de faire partie de ce peuple qui veut être libre, qui veut surmonter le mal, et vivre en fraternité.
Après avoir marché ensemble pendant plus de 2 heures, car nous rentrons à l’église, pour célébrer la messe.
Le peuple d’Akamasoa ne se fatigue pas de prier et de chanter. Il y a là des petits enfants, des autres un peu plus grands, des adolescents, des adultes et des vieillards, hommes, femmes, filles et garçons qui s’asseyent comme ils en ont l’habitude chaque dimanche, par milliers sur les gradins du stade couvert qui est notre église de Manantenasoa.
Ce stade que nous devons sans cesse agrandir ! Car la foule de ceux qui prient augmente chaque semaine ; et quelques mois après des travaux réalisés sur la toiture, nous construisons en ce moment des rangées de gradins supplémentaires, en briques enduites de ciment, afin de pouvoir accueillir quelques 700 personnes en plus des 7 ou 8000 « places » que la structure actuelle offre !
Samedi.
Samedi Saint, c’est la bénédiction du feu, et toute l’église est alors remplie de bougies, manifestant le feu nouveau de la vigile de Pâques. Toutes ces lumières illuminent l’obscurité où l’humanité est tombée à cause de l’égoïsme, du manque d’amour, de partage et de paix. Tant de bougies tenues par tout un peuple dans la nuit, créent un éclat de lumière extraordinaire, un élan de générosité et d’espérance pour chacun.
Nous avons ensuite baptisé 53 adultes, des hommes et femmes déjà adultes et mariés. Un baptême de ce genre, avec des hommes et des femmes qui ont déjà vécu, qui sont déjà affaiblies par la vie et maladie, cela bouleverse au fond du cœur. Car ces personnes sont là, ce ne sont plus des enfants, elles se tiennent debout et demandent à être baptisées, car elles croient en Jésus Christ et en sa résurrection.
Il est impossible de décrire ce moment, très fort à la fois pour ces personnes, mais aussi pour nous, puisque nous le vivons ensemble comme Eglise.
Dimanche de Pâques.
La messe de la résurrection, toujours dans cette église pleine de frères d’Akamasoa, mais aussi de frères touristes de plusieurs pays, de plusieurs nations, nous l’avons célébrée dans une grande simplicité, mais aussi avec une grande ferveur et une grande joie. Une fois encore, c’est un événement qu’on ne peut expliquer, mais qu’on peut simplement vivre et sentir dans son cœur.
Nous avons béni 49 mariages de couples qui ont déjà eu jusqu’à 20 ans de vie commune, et tous leurs enfants étaient présents ; en même temps, ces couples ont reçu la première communion.
Grâce à Dieu, nous avons vécu une fête de Pâques d’une grande joie, d’une grande ferveur et d’une grande intensité, et nous voulons dire merci à tous ceux qui ont participé pour que cette fête soit vraiment une fête ! Dieu ne nous oblige jamais, mais nous invite seulement, et c’est ce que nous avons fait, nous avons fêté et célébré le mystère de l’Eucharistie !
Puisse l’amour et la paix de Dieu transfigurer notre monde d’hostilité, de violence et de guerre. Que cela puisse cesser un jour, et que chacun sache que cela ne dépend que de lui, de chaque personne là où elle vit, là où elle travaille, là où elle aime ses frères et ses sœurs.